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Aymeric Rouillac
Aymeric Rouillac
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17 novembre 2000

ALEP, UNE VILLE FASCINANTE

Le jour de repos pour les musulmans, notre premier jour à Alep. C’est au petit déjeuner que l’évêché grec catholique nous demande de plier bagages. Nous libérons donc les chambres après une nuit toujours très confortable mais sans savoir à quelle porte frapper le soir. Inch Allah. Des arméniens qui nous observent depuis un café autour des voitures viennent spontanément nous offrir quelques spécialités locale : ohmos et lait à la cannelle. Nous arrosons ensemble la demande de l’Union Européenne à la Turquie de solder ses questions arméniennes et kurdes. Après notre nuit à Gölbek nous pouvons affirmer sans complexe que nous " bouffons à tous les râteliers ". Le boss d’une maison d’édition qui passait par là nous donne sa carte de visite et nous met dans un taxi direction la citadelle où, sur ses recommandations, le directeur nous fait enfin profiter du tarif étudiant sans avoir à le justifier.
Cette grosse colline fortifiée par le fils de Saladin n’a jamais put être prise par la force. De là-haut nous dominons Alep, ses quartiers, ses mosquées, ses souks, ses bruits et ses odeurs. Le régal des cinq sens, ou presque. C’est une belle journée d’hiver, il doit faire 25 degrés, la poussière vole dans le ciel, des enfants visitent en groupes ce vestige historique et des jeunes veulent se faire photographier à nos cotés. A midi tous les muezzins appellent à la prière les fidèles dans une belle cacophonie, j’adore. Au pied de l’édifice se trouvent les souks. Le lieu est ouvert mais la plupart des magasins sont fermés, c'est vendredi, l'équivalent, pour les musulmans, du dimanche en France. Comme les options de programme divergent pour l’après-midi, Aymeric quitte le groupe pour visiter seul le musée de la ville d’Alep. J’y retrouve des tablettes d’Ugarit et puis surtout de magnifiques statues sculptées du troisième millénaire avant notre ère. Tout simplement bouleversant. La pierre noire représente des dieux aux formes d’animaux humains dont la taille peut aller de quelques centimètres à plusieurs mètres. Au cour des siècles l’influence des égyptiens avec des dieux à tête de faucons ou des égéens et leurs vaches me rappelle d’anciens voyages et ce vieux dicton africain : si tu n’as pas étudié, voyage. Il n’y avait personne d’autre que moi dans le musée et après avoir bu le thé pendant une heure et demi avec un commerçant du souk je prends la direction du Hammam. Il y en a plus de soixante dans la ville et encore une fois je me retrouve seul. Après un vigoureux shampooing, je m’allonge sur une pierre brûlante puis me retrouve frotté au gant de crins de tous les cotés par un vieil homme bedonnant. Moi qui pensait profiter de cette solitude pour laisser libre cours à mes envies les plus fantasques en compagnie d’une masseuse au corps de rêve c’est raté ! J’ai dû me tromper d’établissement…
A 18 heures je retrouve les trois autres qui ont passé, d’après ce que j’ai compris, leur demi journée à manger des kebab dans un parc, puis à déambuler dans les rues et enfin à boire le thé chez Sisi. Nous rencontrons alors Nouhad, une amie de nos amis de Lataquié…, qui nous conduit chez des jésuites. Moyennant finances, ils veulent bien nous loger. Un peu raide comme hospitalité, mais puisque c’est tout ce que nous avons trouvé nous acceptons de bon cœur. Nouhad se propose alors de nous faire visiter sa ville. Nous louons un minibus (50 balles de l’heure, c’est Aymeric qui sponsorise) qui nous conduit des quartiers ultra riches aux quartiers ultra pauvres. Comme dit le chauffeur avec le prix d’une de ces villas (plusieurs millions de dollars) tu rachètes tout son quartier. Il y a à Alep une vielle aristocratie d’affaire richissime composée de grandes familles sunnites ou chrétiennes. Un peu plus loin, un quartier où la drogue, la prostitution et la misère fournissent un terreau fertile à l’intégrisme. Les femmes sont toutes voilées, la police ne vient jamais jusque-là.
S’ensuit une ballade à pied dans le quartier arménien où un plombier joue au cordonnier pour porter secours au talon de Nouhad. Même sans nos voitures toutes les portes s’ouvrent et nous nous retrouvons dans l'échoppe du graveur d'à côté qui nous offre le thé, et des portes clés. Vraiment très sympa ces Syriens. Nouhad nous invite ensuite dans un restaurant tenu par les deux fils du ministre de l’électricité ! Le cadre est magnifique. Le charme fou qui entoure cette vieille maison arabe n’a d’égale que la qualité de la nourriture et celle de notre discussion. Eh oui, l’aleppine d’adoption qu’est Nouhad est très ouverte. Elle a longtemps travaillé au consulat de France et dirige maintenant l’entreprise d’importation de pièces pour machines agricoles de son père décédé. Elle nous donne un point de vue éclairé et balancé sur ce que nous voyons ici. Nous allons, de rencontre en rencontre, devenir des experts du Proche-Orient. Comme on dit ici, nous vous en parlerons peut-être… un jour !

Aymeric

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